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Qui m'aime me suive...
28 août 2008

Buenos Aires : 1 semaine demain.

Pour moi les vacances sont terminées. Après avoir claqué tous mes sous au Brésil, je cherche un travail en Argentine. Le voyage Rio-Buenos Aires s'est très bien passé. Plus de deux jours. C'est deux nuits d'hôtel économisées.

DSC_2755Demain cela fera une semaine que je suis arrivée. Il ne me reste plus que 60 pesos (moins de 15 euros), et je n'ai toujours pas fini de réviser mon CV en espagnol. Je suis rentrée dans le pays avec un visa de tourisme, mais j'espère qu'une bonne âme voudra bien m'embaucher... J'ai déjà à priori deux élèves potentielles pour des cours de français payés au black : une cousine de Mélina qui veut quitter l'Alliance Française, et la mère de 80 et quelques années de Mélina (qui est psychanalyste). Le bouche à oreille, ça fonctionne, et si l'Alliance Française ne veut pas me donner du travail, je vais lui piquer tous ses clients, na !

Mais comme vous voyez, c'est no stress... J'ai été très bien accueillie. Je suis logée, nourrie, blanchie gracieusement par la mère de Mélina (rencontrée ici lors de mon premier voyage et qui m'avait déjà hébergée à l'époque). Depuis le départ de l'amie en question du foyer familial (elle est juste partie vivre avec son fiancé, Fernando, le même qu'à l'époque), puis la mort de la grand-mère il y a moins d'un an, après une longue maladie, et du père, récemment, la maison s'est transformée en pension pour étudiants (ce qui permet à Liliana, la maman, d'arrondir les fins de mois qui sont maigres, surtout depuis qu'elles ont hérité des dettes du père). Toutes les chambres étaient donc déjà habitée quand je suis arrivée, mais en une matinée de rangements des archives du père (qui était architecte) dans l'ancien sauna (qui ne sert plus depuis des années), et de nettoyage de la cabane au fond du jardin, Liliana m'a organisé une petite chambre bien aménagée, avec douche, toilettes, lavabo, eau chaude, électricité.... manquerait plus que le chauffage (mais les beaux jours sont sur le point de revenir) et la lumière (un court circuit dans la pièce fait que les deux lampes au plafond sont hors service), mais je m'en accommode très bien. Alors la seule nécessité que j'ai c'est de gagner un peu d'argent pour reprendre ma route vers la Colombie, lentement mais sûrement.

En fait, je ne me suis jamais sentie aussi libre et confiante de ma vie. Je n'ai pas encore trouvé de travail, mais no stress ! Il faut dire que je me suis un peu laissée vivre. Je ne sais pas comment mais une fois que je me suis posée ici, je me suis rendue compte que j'avais accumulé de la fatigue... Avec en plus une folle envie de ne rien foutre. Alors c'est ce que j'ai fait : rien. Enfin. En assurant quand même le service minimum : traduire mon CV en espagnol, rendre visite à l'Alliance Française, et revoir mes amis.

La routine quoi. Je me couche tard, je me lève tard, je refais le monde avec mes amis, comme au bon vieux temps. La bière est plus forte ici qu'au Brésil. Et boire dans le froid c'est très différent. Mais c'est pas mal non plus. Le truc c'est que la chaleur n'est pas là pour justifier de boire une bière pour se rafraîchir…

Une charrette tirée par un cheval vient de passer dans la rue. C'est fou, non ? On est en pleine ville, en plein quartier résidentiel, et à ma connaissance il n'y a pas d'écurie, d'hippodrome ou de centre d'équitation tout proche... Enfin.

J'essaye d'apprivoiser le réseau de bus porteño, ce qui n'est pas gagné. Lundi soir j'ai revu un ami, Leonardo. Je l'ai quitté vers 2h du matin (il attendait le bus avec moi depuis 1h30) et j'ai loupé l'arrêt où je devais descendre (le chauffeur a oublié de m'avertir comme je le lui avais demandé), je me suis retrouvée au terminus à 2h30, le bus suivant sortait à 3h30, je suis rentrée à 4h du matin. Heureusement que j'avais mon Ipod pour me tenir compagnie... Je ne sais pas pourquoi je raconte ça. Peut être parce que l'ami que j'ai retrouvé, m'avait dit le soir même : "Tu verras, Buenos Aires est une ville folle, il arrive des choses aux gens, des choses étranges..."

Je regarde beaucoup la télé : des séries débiles états-uniennes sur le câble. Ça fait du bien de temps en temps. Je me refais une culture télévisuelle, après l'avoir si peu regarder en un an (depuis que j'ai quitté la Guadeloupe début avril 2007).

adaptationJe vois des films aussi. Des bons et des moins bons. Un génial, de Spike Jonze (celui qui a fait Dans la Peau de John Malkovitch) : ça s'appelle Adaptation (en anglais), ou Le Voleur d'Orchidées, avec Meryl Streep et Nicolas Cage. Le scénario est incroyable, la narration est très originale : le scénariste s'est inclus lui-même dans le scénario et le récit de son processus d'écriture alterne avec le contenu des scènes qu'il écrit pour adapter un roman à l'écran, d'où le titre original. Et le thème central de la difficulté d'un écrivain à écrire, et encore plus, à adapter le livre d'un autre, m'a énormément plu. Et les personnages sont fous. L'écrivain a un frère jumeau qui est aussi scénariste : il dialogue souvent avec lui. Et ce frère jumeau est en fait une invention… de son esprit fou lorsqu'il écrivait et se perdait dans sa douleur d'écrire, ou juste de son imagination pour agrémenter le film d'un autre élément qui brouille les frontières entre la fiction et la réalité ? Le plus fou c'est que ce frère jumeau écrivain fictif a aussi été candidat aux oscars pour un film lui aussi fictif… Je n'en dis pas plus. Il faut que vous le voyez.

Comme je vous ai dit, j'ai retrouvé des amis ici. Comme prévu (depuis que j'ai repris la route, j'avais décidé de revenir ici, j'en avais envie depuis trop longtemps). Mais trop contente quand même de le revoir. Il y a Mélina, grâce à qui je suis hébergée gratuitement et qui tous les jours m'appelle parce qu'elle a des idées de travail pour moi. Et puis j'ai retrouvé Léonardo aussi. Je vais sans doute faire un film avec lui. L'idée est née lundi soir lors de nos retrouvailles. C'est lui qui m'a dit, au bout d'une heure : "Quand est-ce qu'on fait un film ?" Mélina aussi m'a posé la question, mais plus indirectement : elle a envisagé que je puisse travailler dans ce domaine ici. Elle m'a dit qu'elle aimerait bien participer à un projet cinématographique. Evidemment que je l'y inclurait si on fait quelque chose. Je ne sais pas quoi ni comment. Mais je sens que cela va se faire, si je réussis à rester ici un moment (si je trouve un travail). Ici dans la pension de Liliana, il y a une chilienne, Isa, étudiante en première année de cinéma à l'Université de Buenos Aires (publique, gratuite et la meilleure paraît-il). Coïncidence ?

Avec Léo, nous avons repris notre conversation là où nous l'avions laissée il y a plus de cinq ans. Incroyable. Et ce n'est que la troisième fois que je le vois. Je veux dire, à l'époque où je l'ai rencontré, nous nous sommes vus deux fois. Nous nous sommes rencontrés en décembre 2002 à Humahuaca dans le nord ouest de l'Argentine où nous étions tous les deux juste de passage : je ne sais plus exactement où mais je me rappelle qu'il n'avait pas d'argent et que je l'ai invité à dîner un sandwich milanesa avec le peu que j'avais. Puis je l'ai revu chez lui une journée à La Plata en janvier 2003 quand je suis passée par Buenos Aires (chez Mélina précisément) : j'ai fait l'aller retour en bus Buenos Aires/La Plata dans la journée, on a fait des plans de révolution, écouté les Six Suites pour Violoncelle Seul de Bach interprétées par Pablo Casals (je vantais alors les mérites e l'interprétation plus originale de YoYoMa), c'est lui qui m'a donné El Tunel, d'Ernesto Sabato, que j'ai adoré, et j'ai continué ma route vers la Patagonie. Ensuite on est restés en contact par email, épisodiquement, et lundi soir dernier je l'ai retrouvé, comme si de rien n'était. La révolution, les Six Suites pour Violoncelle Seul, Le Tunnel, Becket et le théâtre absurde, le langage, la transgression des règles sociales et des normes internes, la realité, la nécessité, le sens, la perception, l'interprétation, le rationalisme face à l'inexistence... et le non-sens de la discussion même que nous avions depuis plusieurs heures... Je crois qu'on trouvera matière à faire un film.

Une prof que j'ai eu à Lille, en ciné, et que j'adore, Louisette, m'a écrit. Elle me recommande d'essayer de rencontrer Pino Solanas (L'Heure des Brasiers). J'aimerai bien aussi. Me recevra-t-il ? On verra bien. C'est pas trop mon trip les mondanités... Ni même les combines pour rencontrer des gens inaccessibles parce que reconnus. On verra bien si cela se fait. À Paris cela ne s'était pas fait, avant mon départ pour mon premier voyage en Amérique du Sud.

DSC_2747Avec cette idée folle de film, cette cabane au fond du jardin, toutes ces choses qui se passent et qui m'inspirent, mon état psychologique en suspension depuis mon départ de Colombie (comme si je flottais entre la réalité que je vis, le voyage au quotidien, et celle dans laquelle je m'évade si facilement, ceux qui me manquent et qui me semblent si présents, si proches, les choses que pense faire dans un futur proche, à mon retour en Colombie ou sur la route…)… je crois que je ne suis pas loin des conditions idéales de pression et de température... pour écrire.

Je me dis qu'il faut que je fasse quelque chose de mes photos aussi. Je ne sais pas encore quoi. J'ai tout plein d'idée qui me vienne à l'esprit pour gagner ma vie tout en continuant à voyager. Ma devise ça va être : "Pas de maison, pas de carrière"... et il y aura sans doute d'autres "pas" à ajouter à la liste...

Bref... mon voyage continue. Je veux dire, celui que j'ai commencé quelques mois avant mes 30 ans, le 28 août 2006, date de ma fin de contrat dans un putain de lycée de banlieue parisienne où j'ai passé 3 ans au retour de mon premier voyage en Amérique du Sud : trois ans de parenthèse en quelque sorte, utiles pour faire le point sur moi-même, nécessaire pour franchir le pas suivant, mais pas vraiment agréables. Je me suis promis ce jour là, en quittant ce lycée, en quittant la France métropolitaine, en quittant cette vie où je répondais à plus de contraintes et d'obligations que je ne trouvais de plaisirs et satisfaction, je me suis promis de ne plus jamais y revenir, de partir, de voyager, et de ne jamais arrêter mon voyage... Après la Guadeloupe, Montréal, les Etats-Unis, la Colombie, le Brésil... me voilà à Buenos Aires, au pied du mur,... mais sans aucun stress. Je suis hébergée gracieusement. Et j'avance tranquillement sur mon chemin. Je fais ce que j'ai à faire, et surtout, je fais ce que j'ai envie de faire...

Je crois qu'il n'y a rien de tel pour échapper à la pression sociale, culturelle et économique des sociétés, que de les traverser sans se laisser happer par elles. Tout bouge tout le temps autour de nous, rien n'est permanent, ni à l'extérieur, ni à l'intérieur, en nous. Mais si soi, on bouge, l'environnement n'est plus qu'une succession de clichés dans lesquels on ne peut pas être figé, coincé, pris au piège comme dans une toile d'araignée sur laquelle on doit nécessairement s'appuyer (et donc s'accrocher) quand on vit et qu'on reste à un endroit. Aucun risque d'enlisement. Dans le voyage, l'impermanence est une réalité physique, pas seulement une vision spirituelle.

En tout cas mon voyage va être illimité, et je n'ai pas du tout l'intention de revenir en France, avec ou sans Sarko. En Guadeloupe peut être, quand je serai vielle... Et encore. La France ne me manque pas vraiment. Juste les personnes que j'aime. Je leur rendrai certainement visite de temps en temps. Ou elles le feront. Tout est possible. L'Homme est libre, par définition. C'est juste qu'il l'ignore.

Enfin bon. Je reviendrai bien en Colombie quand même. Je reviendrai en Colombie. De toute façon. C'est là que mes manques m'attirent le plus. Enfin, on s'habitue à tout, même au pire. Je lis Gabriel Garcia Marquez en attendant... de quoi tuer le temps de l'absence... Il faut laisser du temps au temps, non ?

Ne vous attendez pas à me relire si longuement de si tôt...Ceci est une preuve tangible ponctuelle et exceptionnelle de mon existence et l'apparition du phénomène est lié à des circonstances elles-mêmes exceptionnelles. Ceci dit je retourne dans mon monde fantastique.

Voili, voilou.

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