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Qui m'aime me suive...
5 mai 2009

Vivre libre... ou l'évidence.

Extrait d'un message écrit à une amie, en réponse à son mail où elle s'interroge sur ses choix, son chemin, comparés à ce qu'elle pense comprendre des miens (choix, chemin). En italique ce sont des citations de son mail.

Que dire ? "Je ne sais pas [non plus] quoi faire de mes 10 doigts... j' [ai toujours été] écœurée par les jobs pseudo-intellectuels de bureau... [je crois avoir] des talents artistiques particuliers", mais je suis incapable d'aller jusqu'au bout de moi-même, de les transformer en œuvre, d'y croire vraiment, et la plupart du temps je me dis d'ailleurs que c'est une illusion totale, que je m'invente cette croyance pour exister, et que dans le fond ce que je fais ne vaut rien, et qu'un jour, comme Arthur Rimbaud, mais sans même avoir laissé le tiers du quart de quelque chose qui ait l'authenticité, la sincérité, la beauté, la profondeur de son œuvre, je me réveillerai brutalement et irai vendre des armes en Afrique, comme lui...  "Je n'ai pas de vocation" : ça c'est sur !

"Simplicité volontaire" : l'expression me plait. J'aime. C'est exactement ça que je veux : la simplicité, aller à l'essentiel, me consacrer à l'essentiel. Mais quoi ? Il y a tant de choses que j'aime, laquelle est mienne ? Il y a tant de choses qui s'agitent, en moi, et autour de moi : comment canaliser ce tumulte dans une direction, dans un projet qui soit mien, clair, évident, et aussi efficace, utile, important. Peut-être ce désir de grandeur qui se trahit encore dans le choix du mot "important" est ce qui m'empêche de "faire" simplement... Me détacher de mon égo : c'est sans doute ma prochaine bataille à mener pour me libérer de ce qui m'empêche encore de me réaliser.

Tu sais : je donne l'impression de faire des choix, mais dans le fond je n'ai pas tellement le choix. J'accepte si peu les compromis avec le système que je suis bien obligée d'imaginer des modes de vie, des façons de faire autres, une voie alternative... Et figure-toi qu'à chaque fois que je dévie de cette exigence personnelle qui s'impose à moi : suivre ma propre route, être cohérente avec moi-même, poursuivre l'essentiel, exprimer, respecter et réaliser mes désirs profonds, eh bien la vie me fout des claques, et se charge de me mettre dans une situation tellement inconfortable que je suis obligée de me recentrer sur moi-même, mon identité, ma quête d'absolu, de liberté, de bien-être. Ce n'est pas un choix, c'est une nécessité.

"La précarité, les sacrifices pour être libre...", c'est pas tant de pression que ça. Et certainement moins de pression que de se laisser malmener par toutes les celles sociologico-économico-psychologico-conformistes des sociétés dans lesquelles nous vivons : have a good job, a powerfull car, suck your boss to get a big raise, buy a nice house, find a nice wife (le cliché est nécessairement destiné aux hommes, la femme n'étant qu'un satellite dans l'univers du héros macho), make her two beautiful children, a boy and a girl,... and then, wake up at 40, 50 or 60 years-old... avec l'étrange sensation d'avoir tout raté, de vouloir tout changer, de pouvoir commencer enfin à vivre.

La seule façon de vivre qui soit facile, c'est d'être conforme aux normes, aux attentes de la société, c'est-à-dire, être un mort-vivant, un zombie, dont l'âme a été dévorée par la peur de faire face à soi-même. Et surtout ne pas penser, jamais. Parce que penser c'est le début de la fin. Je comprends très bien ta situation actuelle (enfin, je crois) : tu nages entre deux eaux. D'ailleurs, je corrige : je comprends très bien ce que tu exprimes dans ce mail que tu m'as écrit le 3 avril, car sans doute, depuis, les choses ont-elles changé, peut-être même radicalement, peut-être as-tu fait un choix pour trancher, une fois pour toute, et t'engager dans une voie ou une autre (accepter de s'oublier pour répondre aux attentes de la société, ou be yourself, no matter what they say, comme dirait mon ami Sting), ou alors as-tu coupé la poire en deux, et alors, la question, quelle voie vais-je suivre, ressurgira nécessairement, un jour où l'autre. Parce que la question, notre question, ressurgit toujours, elle nous poursuit, jusqu'à ce qu'on y fasse face, jusqu'à ce qu'on l'affronte, jusqu'à ce qu'on accepte de faire face à soi-même.

Alors oui, j'ai choisi, entre lutter et crier et me plaindre et pleurer et me battre et fermer les yeux... dans un système plus fort que moi qui de toute façon va me broyer, m'aliéner, me compromettre, me confondre, me désintégrer, m'obligeant à mentir, haïr, trahir, gagner, dominer, mépriser, abuser, voler, violer, blesser, tuer pour survivre (sans pour autant pouvoir rester digne et moi-même), et la stratégie de l'esquive (et non pas de la fuite), qui consiste à laisser passer les énergies négatives qui animent ce monde, surfer sur les positives, pour se laisser porter au-delà de soi-même.

Oui, j'ai fait un choix, mais crois-moi, il ne requiert pas de force particulière, c'est un choix par défaut, quand on sait ce qu'on ne veut pas, qu'on a des valeurs un tantinet humanistes... il n'y a pas de choix : juste Soi, l'Autre et le Monde. Non, je n'ai pas de volonté. Je ne veux rien. C'est "rechigner à participer à ce système" dont je sais bien qu'il ne me respecte pas, qui m'oblige à faire ce choix. La révolution, qui construit nos rêves dans la réalité, est intérieure. Et la vie est comme une toile d'araignée, qui émane de notre cœur, et que nous tissons en lien avec les toiles des autres, et qui rayonne autour de nous quand nous savons reconnaître qui nous sommes. Se reconnaître soi est le premier pas. La source. Là où tout commence.

Que dire ? On dirait bien que j'avais des choses à dire...

Voili, voilou.

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Commentaires
C
Je crois que je comprends très bien ce que tu dis, et je crois que je n'aurais aucun regret à laisser s'éteindre les envies de créer si c'était pour qu'elles soient supplantée par la vie. Et c'est exactement la sensation que j'éprouve. Un peu comme si créer était toujours un acte désespéré, vécu comme une nécessité (de s'exprimer, d'exprimer une souffrance, une existence), certainement pas un loisir... et que du coup, quand on est en phase avec soi-même, l'espace, le temps, ses désirs, que l'on fait face à ses peurs, on ne trouve pas le temps d'écrire, et le besoin de créer s'estompe...<br /> <br /> Mais ma vie n'est pas encore tout à fait satisfaisante non plus...<br /> Tant de choses me traversent.
C
Balzac a dit : « Comme je ne sais rien faire, je me ferai écrivain! » D'ailleurs, un artiste est la plus belle des contradictions. Ce qui signifie que si on n'y croit pas vraiment (mais je suis incapable d'aller jusqu'au bout de moi-même, de les transformer en œuvre, d'y croire vraiment, et la plupart du temps je me dis d'ailleurs que c'est une illusion totale), c'est qu'« on » commence de se détacher de la masse et qu'on commence à vivre. Comment ? Impossible de le savoir exactement. C'est ce qui fait le charme du doute. On peut toujours se retourner sur soi-même et découvrir... l'amour, le désir, la peur, la joie!
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